Premières images et rencontre avec le réalisateur de "Casa Negra"
Nous avons eu la chance de visionner pour vous les premières images inédites de Casa Negra, le dernier long métrage cinématographique de Nour-Eddine Lakhmari. Fidèle à sa ville natale, Safi, Lakhmari était de passage et nous a fait l'honneur de nous faire découvrir son travail... Et bien, il faut tout simplement s'attendre à une petite révolution visuelle dans l'univers du cinéma marocain.
"Casa Negra" est un film noir qui se passe dans les bas-fonds du Casablanca d'aujourd'hui où deux amis, Karim et Adil, préparent un dernier coup. "Casa Negra" est le Mean Streets de Lakhmari. Hommage à Scorsese, le réalisateur américain qui l'a tant influencé. "Le seul problème, avoue-t-il, quand on travaille sur le Casablanca de la rue, c'est la langue. Car si le spectateur accepte une certaine grossièreté en français et en anglais, il n'y est pas habitué en arabe. Or mon sujet ne peut se traiter qu'avec le langage de la rue. Je me demande avec un peu d'appréhension quelle sera la réaction du public."
Acteurs inconnus
"Pour jouer Adil et Karim, déclare Lakhmari, j'ai voulu des acteurs parfaitement inconnus du monde du cinéma. Omar Lotfi (Adil) n'a jamais étudié l'art dramatique. Et pourtant, ils vont surprendre tout le monde. Ils ont su dégager la force et la violence que j'attendais de mes personnages."

Film noir... et blanc
"Casa Negra", c'est le côté sale de la capitale économique du Maroc, la ville pas si blanche de Casablanca. C'est l'ancien Casa, celui qui vit de la débrouille mais aussi de la solidarité que la dèche rend obligatoire. "Casa Negra", c'est la moitié oubliée de Casablanca.
Le film est donc basé sur une dualité fondatrice: le Noir et le Blanc. Une dualité que Lakhmari a travaillé visuellement en rendant sa photo aussi proche du noir et blanc que la pellicule couleur ne le permet. "Le chef lumière et le directeur photo sont les postes clés d'un tournage. La post-production ne peut pas rattraper une mauvaise lumière. L'atmosphère visuelle du film se crée sur le plateau", affirme le réalisateur, très pointilleux sur ses ambiances.
La dualité du thème et de l'ambiance se traduit aussi dans les décors, les lieux et les moments de tournage. "Casa Negra a été un film particulièrment épuisant, continue le réalisateur, car il s'est principalement tourné la nuit. Je voulais capturer cet autre Casa qui vit quand les autres dorment."
Autre choix esthétique lourd de sens, Lakhmari a pris pour décors les vieux quartiers Art Déco de Casa. Vestiges d'une autre époque, leurs murs blancs aux formes encore majestueuses se détachent des trottoirs noirs de crasse et de misère.
Et puis "Casa Negra", c'est le voyage de deux jeunes de la ville noire vers les lumières de la ville blanche. Là où les villas des notables et des bourgeois regorgent des trésors ignorés des habitants des bas quartiers. Lakhmari utilise la dualité sociale du Maroc pris dans la spirale du libéralisme comme trame de fond de l'intrigue de ce film noir. Un film qui se veut pourtant porteur d'espoir et de moments magiques qui viennent briller dans la nuit du Casa des pauvres.